Par Vassilios Papadopoulos, Armen Aprikian, Bartha Maria Knoppers, Martin Leblanc, Gwendolyn Andrews Nacos, Tommy Nilsson, Louise Pilote
Les TI en santé évoluent parallèlement à la génomique et à la protéomique, des domaines de la science qui font de la médecine personnalisée une réalité. Le Dr Vassilios Papadopoulos, directeur, Institut de recherche du CUSM, a présidé une discussion en table ronde entre cliniciens, patients, chercheurs et fabricants de médicaments pour examiner comment ces nouvelles technologies révolutionneront les soins de santé. Autour de la table se trouvaient : Dr Armen Aprikian, chef, Mission soins de cancer, CUSM ; Professeure Bartha Knoppers, directrice, Centre de génomique et de politiques, Université McGill ; Monsieur Martin Leblanc, président-directeur général, Caprion Proteomics ; Madame Gwen Nacos, fondatrice, Faire Face, L’Institut des Cèdres contre le cancer ; Dr Tommy Nilsson, directeur, Protéomique et médecine systémique, Institut de recherche du CUSM ; et Dre Louise Pilote, directrice, Division de médecine interne, CUSM. —Rapport d'une discussion en table ronde produite dans le cadre du programme 2010 de l'IASI-CUSM
Introduction du président
Au 20e siècle, nous avons compris l’incidence du mode de vie et des antécédents familiaux sur la santé. Mais la dernière décennie a révolutionné la médecine avec la caractérisation du génome humain. La carte du génome humain a été complétée en 12 ans, au coût de 12 milliards de dollars. En 2007, le génotypage (séquençage génomique) du Dr James Watson, le découvreur de l’ADN, a coûté un million de dollars. Aujourd’hui, on en obtient un pour environ 65 000 $, et la concurrence internationale pourrait ramener ce coût à quelque 1 000 $.
Ces découvertes ont débouché sur le concept de médecine personnalisée, qui correspond essentiellement à l’utilisation des données du génotype de l’individu dans la sélection du traitement le plus approprié. La médecine personnalisée a pris son essor en oncologie, en particulier dans le traitement du cancer du sein : des marqueurs génétiques nous permettent de prédire avec assez de précision le type de cancer, son évolution et la réponse à une pharmacothérapie. Nous nous éloignons de l’époque où l’on administrait à tous les patients un même médicament qui ne procurait aucun effet ni bienfait à la moitié d’entre eux.
La médecine à venir sera beaucoup plus personnalisée, et on prescrira au patient un traitement établi en fonction de son profil génétique. En fait, nous délaissons aussi les soins qui ne font que traiter la maladie pour des soins qui assurent le maintien de la santé, passant ainsi de la médecine personnalisée à la prise en charge personnalisée de la santé. Celle-ci s’appuiera sur la connaissance moléculaire de la maladie tirée des profils du patient — clinique, génomique, génétique et environnemental. Cette approche accorde la priorité à la prévention pour ceux qui sont encore en bonne santé ou chez qui la maladie n’en est qu’à ses premiers stades. Certains considèrent que la prévention coûte trop cher, mais elle offre peut-être la solution à l’escalade des coûts.
Si la génomique nous fournit l’alphabet utile à la lecture des caractéristiques individuelles, d’autres données fournies par les protéines, les métabolites et l’imagerie fine permettent de former des mots et de graver un dossier complet sur une carte à puce. Le patient peut apporter sa carte au médecin, qui voit immédiatement les problèmes à traiter et détermine la marche à suivre selon le profil du patient. Ces technologies existent déjà, mais leur application n’est pas encore répandue.
Le cadre des politiques et des infrastructures au sein duquel se développera la médecine personnalisée sera déterminant pour la prise en charge personnalisée du patient en 2020.
Betty 2020
Le Dr Papadopoulos présenta deux scénarios fictifs pour illustrer l’impact possible de la génomique et de la protéomique sur les soins de santé en 2020
Scénario #1
Dans un scénario optimiste, Betty fête ses 18 ans en 2020 et remplit son profil d’antécédents familiaux. Elle apprend que des membres de sa famille ont développé une cardiopathie à un âge assez jeune. Son médecin lui suggère un génotypage complet au coût de 1 000 $. S’inquiétant des conséquences que le dépistage d’une maladie pourrait avoir sur ses assurances, elle fait des recherches et apprend qu’une loi fédérale interdit la discrimination génétique. Son génotype révèle la présence de trois variantes génétiques qui, selon des études probantes, multiplient par cinq son risque de subir une crise cardiaque. Avec le médecin, elle dresse un programme de prévention qui repose sur une saine alimentation, l’exercice et une médication établie en fonction de son profil génétique. Betty se porte bien jusqu’à l’âge de 75 ans, où elle éprouve une douleur dans le bras gauche, qu’elle attribue au jardinage. Mais le médecin connaît le risque qu’elle présente et diagnostique un infarctus aigu du myocarde. Il consulte son génotype et trouve les médicaments qui conviennent le mieux à son profil. Elle continue à vivre en bonne santé jusqu’au 22e siècle.
Scénario #2
Dans un scénario pessimiste, Betty ignore ses antécédents familiaux. On lui propose le génotypage, mais elle refuse, car son frère s’est vu privé d’assurance-maladie à cause de ce genre d’information. Elle s’alimente mal, grossit et devient hypertendue. On lui recommande des tests capables de prédire quels médicaments seraient les plus efficaces dans son cas, mais ces tests n’ayant pas été validés, ils ne sont pas remboursés. On lui prescrit un hypotenseur, qui entraîne chez elle une réaction d’hypersensibilité ; elle abandonne le traitement. Deux années s’écoulent sans qu’elle ne maîtrise sa tension artérielle. Maintenant âgée de 45 ans, Betty éprouve une douleur dans le bras gauche. Son médecin, qui ignore sa pré?disposition génétique, croit qu’il s’agit d’un problème musculosquelettique causé par le jardinage et lui prescrit du repos. Betty retourne à l’urgence le lendemain, dans un état de choc cardiogène. Comme on ne dispose pas de son profil génotypique, on ne peut faire le choix de traitement optimal, et elle meurt à l’urgence.
Discussion
Le Dr Papadopoulos invita les experts de la table ronde et les membres de l’auditoire à amorcer une réflexion sur les enjeux soulevés par le cas de Betty et à proposer des pistes de solution.
Les Canadiens seront-ils protégés contre la discrimination fondée sur les données génétiques ?
Prof. Knoppers : Rien ne protège nos données et n’empêche les assureurs de les utiliser à des fins préjudiciables. Pourtant, les gens s’intéressent beaucoup à l’information génétique, pour des raisons liées à la généalogie et à la santé. Leurs gènes et leurs antécédents familiaux ne les inquiètent pas. Les comités d’éthique, cependant, se méfient des protocoles de recherche qui comportent la divulgation de maladies éventuelles aux patients. Ils encouragent ce que j’ai appelé « l’exception génétique », soit l’idée selon laquelle l’in?formation génétique n’est pas une donnée normale de la « condition humaine ».
La médecine personnalisée transformera-t-elle les soins offerts au patient ?
Dre Pilote : L’information génomique n’est qu’une donnée supplémentaire que les médecins utiliseront pour traiter les patients. Nous devons d’abord faciliter l’accès aux données que nous avons déjà. Encore aujourd’hui, il n’est pas simple pour le médecin d’accéder aux résultats d’analyses sanguines, d’imagerie et d’évaluations psychosociales pour choisir en toute connaissance de cause le traitement le plus apte à modifier la progression et le pronostic de la maladie. Donc, le premier enjeu est d’améliorer l’accès à l’information actuellement disponible et le deuxième, de déterminer ce que l’on fera avec les nouvelles données issues de la génomique.
Dr Nilsson : Le médecin se spécialisera-t-il dans l’interprétation de données protéomiques, génomiques, transcriptomiques et métabolomiques, etc? Devrons-nous créer un support qui traduira l’information en données utilisables? Et que faire pour préparer la prochaine génération de médecins qui travailleront avec ces technologies ?
Il y aura des centaines de paramètres, certains utiles et d’autres non. Dans le milieu de la recherche, nous avons une nouvelle discipline, la biologie systémique, qui fait appel à l’informatique pour organiser ces données complexes et en extraire de l’information utile. Et quand les données de la génomique seront couplées aux caractéristiques du patient — âge, sexe, occupation — et intégrées dans une analyse informatique, cela deviendra de la médecine systémique. Le médecin fera appel à des systèmes experts, mais la décision finale lui appartiendra encore. Il devra simplement consulter un autre ensemble de règles sur son PDA pour choisir le traitement approprié. Mais il faut bâtir l’infrastructure pour s’assurer d’avoir le soutien nécessaire.
Prof. Knoppers : Selon moi, la nanotechnologie et la bioingénierie au point d’intervention simplifieraient les déplacements pour un test ici et un examen là, et élimineraient l’incessant brassage des dossiers papier. En 2020, nous aurons organisé les dossiers médicaux électroniques, dans lesquels les données de la recherche seront traduites en termes utiles pour le médecin de famille et l’hôpital.
Aboutirons-nous à des soins « anonymes » ?
Dr Aprikian : Si la technologie s’améliore au point de nous permettre de prédire les maladies et l’efficacité de médicaments particuliers, il est facile d’imaginer une médecine plus impersonnelle, où les gens n’auront plus de médecins, mais des ordonnances à long terme établies en fonction de leurs génotypes : à 20 ans, il faut passer cet examen, à 40, il faut commencer à prendre de l’aspirine, et ainsi de suite. Les médecins seront moins nombreux, et leur rôle se résumera à intervenir quand l’algorithme ne fonctionne pas. Qu’en penseront les patients ? Certains disent encore qu’ils aimeraient passer plus de cinq minutes dans mon bureau, pour avoir des nouvelles de mes enfants et me parler de leurs vacances.
Mme Nacos : Le médecin aide le patient à démêler toute l’information qu’il a trouvée. D’ailleurs, à l’Institut des Cèdres contre le cancer, nous donnons des séances d’information et à chacune, nous demandons aux gens la raison qui les a amenés ici. Certains ont lu l’annonce dans le journal local et d’autres ont vu les affiches et les dépliants, mais les deux tiers de l’auditoire sont là parce qu’ils ont reçu une lettre de leur médecin leur recommandant d’assister à la séance. Ce que le médecin dit au patient est très important et je ne crois pas que cela changera. Sauf que les patients auront plus d’information et exigeront peut-être du système qu’il réponde à leurs besoins.
Les examens requis pour prévoir la réponse du patient à un médicament donné seront-ils mis au point, validés et remboursés?
M. Leblanc : Le médicament remboursé par notre système de santé n’a, en moyenne, d’effet bénéfique que chez 40 % des patients qui le prennent ; 60 % n’y répondent pas et certains souffrent d’effets indésirables assez graves pour exiger une visite à l’urgence. Cela est en train de changer, à mesure que l’on resserre les critères d’approbation de nouveaux médicaments. Aux États-Unis, la FDA oblige le fabricant à réaliser une étude comparative de l’efficacité d’un nouveau médicament par rapport aux médicaments déjà commercialisés avant d’amorcer le processus d’approbation. On parle de réduire les coûts de remboursement en mettant l’accent sur les 40 % de patients que le médicament peut aider et aide effectivement. Pour ce faire, il faudra reconnaître ces patients au moyen d’un outil de diagnostic ou d’un marqueur précoce, capable d’évaluer l’efficacité d’un médicament. Avec le gène HER2, nous avons obtenu d’excellents résultats. Nous avons un test qui détermine quelles sont les patientes présentant une probabilité élevée de répondre au Herceptin et nous pouvons décider de le prescrire à ces femmes et de le rembourser. Dans ce cas plutôt rare, nous disposons de paramètres objectifs, mais dans le monde du médicament d’ordonnance, on ne demande pas mieux que d’avoir beaucoup de nouveaux paramètres.
Combien de temps faudra-t-il pour mettre au point des outils cliniques utiles découlant des découvertes réalisées dans les nouvelles disciplines ?
M. Leblanc : La méthode simpliste pour définir de nouveaux paramètres consiste à accumuler des centaines ou des milliers d’échantillons provenant de patients et à les analyser systématiquement au moyen de la protéomique, de la génomique et de l’imagerie en vue de déterminer quels paramètres pourraient donner lieu à des tests validés et améliorer la pratique médicale. Cependant, l’industrie pharmaceutique ne peut se permettre d’entreprendre à elle seule les programmes parallèles nécessaires à la mise au point des outils de diagnostic. Et nous ne voudrions pas que ce soit le cas. Pour tirer pleinement parti des avantages économiques de la médecine personnalisée, nous ne voulons pas forcément qu’une entreprise unique détienne la propriété intellectuelle des outils de diagnostic. Ceux-ci devraient, idéalement, créer des conditions égales pour toutes, de telle sorte que l’on évaluerait les médicaments d’un même groupe en fonction du même test prédictif. De cette façon, l’outil de diagnostic ou le biomarqueur offrirait le meilleur potentiel de bienfaits pour la santé publique.
Prof. Knoppers : La bureaucratie d’approbation s’appuie encore sur les distinctions classiques entre médicaments et instruments médicaux. Les chercheurs qui s’intéressent aux nouvelles technologies s’interrogent sur le chemin à suivre : quel modèle convient le mieux à la médecine régénérative, celui de l’instrument ou du médicament ? Et la nanotechnologie ? Sur le plan réglementaire, la classification des nouvelles technologies soulève d’incroyables difficultés pour les chercheurs, et le système n’est plus réceptif.
L’autre problème qui se pose du côté de la recherche tient à la difficulté d’accès aux données et aux échantillons sans lesquels on ne peut réaliser les vastes études d’identification des marqueurs génétiques. Les formulaires de consentement sont toujours aussi compliqués qu’avant et les chercheurs doivent obtenir l’approbation de divers comités d’éthique et du ministère avant d’amorcer un projet. Nous avons grand besoin de règles d’exonération, fondées sur une confiance et une reconnaissance mutuelles, et de processus d’examen multicentrique uniques.
Aux États-Unis, un nombre croissant d’hôpitaux avisent les patients que leur matériel biologique anonymisé sera utilisé pour des recherches sur la mise au point de tests et de soins plus ciblés, à moins qu’ils ne s’y opposent. Reste à savoir si les gens d’ici accepteront de fournir des renseignements personnels et des échantillons dans un contexte sécuritaire.
Dr Aprikian : Nous avons la technologie, l’informatique et les cerveaux, mais l’industrie et le milieu universitaire ont besoin de matériel à analyser. Si, dès maintenant, tous les patients qui passent la porte du CUSM donnent un échantillon de sang et remplissent un questionnaire détaillé — avec garantie de confidentialité — nous aurons en 2020 les données d’une cohorte longitudinale et les moyens de répondre à nos questions. Mais en l’absence d’une vaste banque de données, nos questions seront encore sans réponse dans dix ans, malgré le fait que nous disposerons de technologies plus perfectionnées.
Les gens veulent-ils obtenir de l’information génétique pour prédire leurs problèmes de santé futurs ?
Mme Nacos : Beaucoup de patients aimeraient connaître leur profil génétique pour faire des choix éclairés concernant des interventions chirurgicales non urgentes ou des traitements préventifs. Certains ne voudront pas savoir, et les droits de chacun doivent être respectés. En ce qui concerne les gènes BRCA dans les familles ayant des antécédents de cancer du sein, certaines femmes de la famille veulent savoir et d’autres non, ces dernières ne voulant pas être placées devant un choix difficile. Il faut respecter les souhaits de chaque personne.
Dre Pilote : À part quelques exceptions, comme dans le cas du gène BRCA, que pourrais-je faire aujourd’hui avec cette information ? Les mesures de prévention de la maladie relèvent pour la plupart du bon sens : faire de l’exercice, ne pas fumer et éviter l’obésité. Alors, cela ne changerait rien à mon pronostic. Après avoir essayé pendant de nombreuses années, il nous est très difficile d’amener les patients à changer de comportement, que ce soit par rapport au mode de vie ou à l’observance du traitement. L’intégration de l’information que nous donnons aux patients au sujet du mode de vie devra faire l’objet d’études, réalisées parallèlement à l’adoption de la médecine personnalisée.
Dr Papadopoulos : La médecine systémique ne se limite pas au génome. Elle examine aussi les protéines et les métabolites, et incorpore le tout pour mieux prédire la survenue de la maladie ou la réponse à la médication. C’est ce que nous entendons par l’approche personnalisée de la gestion de la santé. Le génome est l’élément que nous avons déjà. Les autres sont en voie de développement. Le protéome personnel s’en vient.
Quelle sera l’incidence de la médecine personnalisée sur les coûts de la santé ?
Dr Papadopoulos : Coûtera-t-elle plus cher que notre médecine réactive actuelle, où l’on essaie un médicament après l’autre dans l’espoir que l’un d’eux fera effet alors que l’état du patient se détériore, parfois jusqu’à exiger de coûteux soins hospitaliers ?
Dr Aprikian : En oncologie, nous consacrons beaucoup de fonds publics au dépistage sur une vaste échelle. Le rendement du capital investi dans le dépistage du cancer du sein (mammographie), de la prostate (APS) et du côlon se traduit par une réduction d’environ 6 % de la mortalité due à ces cancers. Si nous mettons au point des biomarqueurs capables de circonscrire un groupe cible plus restreint, les économies ainsi réalisées pourront servir à de nouveaux traitements anticancéreux beaucoup plus coûteux que les traitements du passé. Les nouveaux médicaments conçus à partir des découvertes de la protéomique ciblent souvent une ou deux caractéristiques que tous les patients ne présentent pas. On comprend alors qu’un médicament qui ne s’adresse qu’à 5 % de la population ayant un cancer donné puisse avoir un intérêt limité pour l’industrie, à moins que le prix en soit très élevé. D’ailleurs, il existe un tel médicament pour le cancer du rein : celui-ci prolonge la vie de trois mois mais coûte 50 000 $.
M. Leblanc : Les exemples du cancer du sein et de la prostate montrent que les tests actuels n’ont pas de valeur prédictive et que les biomarqueurs ne sont pas tous efficaces. Un biomarqueur très sensible ou spécifique pour le dépistage d’une maladie est peut-être très utile et rentable pour le système de santé, mais des données de plus en plus nombreuses indiquent qu’un biomarqueur comme l’antigène prostatique spécifique, qui produit de nombreux faux positifs, entraîne plus de coûts qu’il n’en évite, malgré que l’intention soit bonne au niveau personnel. L’aspect le plus coûteux sera de concevoir et de valider de nouveaux outils dont la valeur prédictive sera nettement plus grande, mais une fois que nous les aurons, ceux-ci réduiront les coûts s’ils sont utilisés correctement.
Dre Pilote : Certaines technologies, dont le dépistage de l’APS, sont adoptées avant même qu’on ne sache si elles sont rentables ou même utiles. Bien sûr, on peut reconnaître que la médecine personnalisée est une bonne idée et qu’elle devrait permettre d’économiser. Mais l’évaluation de ces nouvelles technologies doit être aussi approfondie qu’elle l’est pour d’autres technologies. Le CUSM a depuis longtemps une excellente réputation en matière d’évaluation technologique et peut jouer un rôle de premier plan dans la réalisation des évaluations.
Conclusion
L’avenir de la médecine est très prometteur. Cependant, la médecine en 2020 reposera évidemment sur ce que nous faisons aujourd’hui. Plusieurs choses doivent être prises en considération, non seulement par les fournisseurs de soins, mais aussi par toutes les parties prenantes, y compris les Canadiens bien-portants. Et le plus tôt sera le mieux.
Les nombreuses personnes qui essaient de changer leur mode de vie et de respecter leur traitement font face à d’énormes obstacles. Les résultats pour la santé changeront-ils si les facteurs de risque sont connus des années à l’avance ? Sur un plan éthique, qu’entraîne le fait de se savoir exposé au risque génétique de développer une maladie donnée si cette maladie ne se manifeste jamais malgré la prédisposition ? Avec l’arrivée de nouveaux médicaments coûteux, devrons-nous choisir entre longévité et qualité de vie ? Que le patient d’aujourd’hui soit informé le rend-il mieux informé ? Si la biologie systémique émerge comme un nouveau domaine, que devra-t-on développer en parallèle et comment adapterons-nous nos programmes universitaires pour nous y préparer ? Comment gérer le plus efficacement possible le volume de données toujours plus grand ? En tant que citoyens bien-portants, comment assumer une plus grande part de responsabilité envers notre santé ?
Voilà pourquoi il faut explorer plus à fond les infrastructures (installations, équipement et informatique médicale), le contrôle des coûts (pérennité), les résultats (valeur des traitements), les cadres éthiques et les outils éducatifs (pour patients et bien-portants). À cet égard, nous reconnaissons que le CUSM devrait jouer un rôle de premier plan dans la recherche, le développement, l’évaluation et l’intégration des technologies qui façonneront la médecine de 2020.