Matthew Anderson, président et chef de la direction du William Osler Health System, s’emploie à forger des liens plus étroits entre les établissements de soins tertiaires, secondaires et communautaires. —Rapport d'une allocution prononcée à la conférence 2010 de l'IASI-CUSM

L’information que nous fournissent les TI nous aide à comprendre ce qui se passe dans notre système de santé et nous montre comment nous pourrions agir sur la dynamique à l’origine de certains problèmes de capacité.

Orienter nos efforts vers les actions susceptibles de dégager le plus d’avantages

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Courtoisie de M. Matthew Anderson

La maladie chronique a une incidence énorme sur les coûts de la santé, et ce, au moment même où tous doivent réduire le déficit. La figure 1 montre la répartition des dépenses de santé dans la population. Il s’agit de la version ontarienne de la pyramide de Kaiser Permanente, qui montre que la majorité des ressources sont en réalité affectées à un pourcentage relativement restreint de la population. La courbe correspondant au RLISS Centre-Ouest correspond grosso modo à la courbe de la province dans son ensemble : 80 % des ressources sont consacrées à 5 % de la population. Au WOHS, nous cherchons à cerner ces 5 %. Nous avons déjà établi que 80 % d’entre eux sont des personnes âgées fragiles, si bien que des améliorations dans les soins dispensés à ce groupe pourraient avoir d’importantes répercussions sur l’autre extrémité de la courbe et permettre d’investir dans des programmes préventifs en vue de retarder l’apparition de la maladie. Pour nous, il est très utile de comprendre la distribution de nos dépenses.

Cerner le problème assez bien pour le corriger

En Ontario, on parle de patients exigeant un autre niveau de soins (Alternative Level of Care) pour désigner les patients qui sont hospitalisés, mais ne devraient pas l’être. Ces patients occupent environ 10 % des 3 000 lits de la province. Or, dans une urgence de Toronto, à n’importe quel moment, environ 100 personnes attendent qu’un de ces lits se libère.

En tant qu’administrateur au sein du réseau de la santé, il m’est difficile de dire qu’il faut ajouter des lits alors que ceux dont nous disposons sont mal utilisés. Nous avons examiné les chiffres plus attentivement et découvert que la période d’attente, pour la grande majorité de ces patients, est inférieure à huit jours. Si l’attente avait été de 100 ou 200 jours, il aurait pu s’agir d’un problème de capacité dans les établissements de soins de longue durée, entre autres causes. Mais une attente de moins de huit jours reflète plutôt des problèmes liés aux processus, et non à la capacité.

Analysant la gestion des congés dans un hôpital de Toronto, nous avons constaté que la planification du congé n’était amorcée que le jour même du congé dans 40% des cas et qu’il fallait ensuite trois jours en moyenne pour démêler et organiser le congé. Donc, pour 40 % des congés, nous introduisions dans les transferts de patients exigeant un autre niveau de soins un délai de trois jours. Or, ce n’est qu’en utilisant ce type d’information que nous commençons à comprendre ce qui se passe dans notre système de santé et à déterminer les démarches qui seront vraiment efficaces.

Permettre aux patients de prendre en main leurs propres soins

Le modèle Wagner (voir la figure 2) montre l’aspect que pourrait prendre un système de santé porté par l’information. Il met l’accent sur les systèmes d’aide à la décision afin de favoriser un modèle encore plus axé sur la prévention. Il souligne également l’importance d’une équipe bien préparée et proactive. Mais la partie que je préfère, c’est le patient informé, actif.

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Courtoisie de M. Matthew Anderson

Ceux d’entre nous qui ont la chance de vivre sans maladie chronique saisissent mal à quel point la maladie peut transformer le rapport du patient avec le système de santé et l’information sur la santé. Il y a des années, lors d’une conférence, j’ai fait étalage de mon ignorance en ce qui a trait à l’autonomisation du patient et à l’accès de ce dernier à ses propres données de santé. Je ne voyais pas l’avantage qu’il y aurait à fournir les résultats de laboratoire et d’imagerie aux patients, qui ne sauraient pas quoi en faire. Il a fallu environ six secondes pour que cinq personnes vivant avec une maladie chronique répliquent qu’elles voudraient ces résultats et les interpréteraient sans l’aide de qui que ce soit. Les patients sont très préoccupés par l’inertie qui caractérise notre gestion de l’information : les résultats de laboratoire peuvent être communiqués presque immédiatement, mais ils attendent quelque part jusqu’à ce qu’une personne les examine et décide à quel moment le patient les recevra. Les gens qui vivent avec une maladie chronique ont clairement dit qu’elles aimeraient avoir cette information dès qu’elle est disponible.

Favoriser les liens avec les organismes communautaires

Quand je travaillais au RLISS de Toronto, deux petits organismes de santé mentale et de lutte contre les toxicomanies m’ont dit que, lorsqu’un de leurs clients ne se pré?sentait pas à un rendez-vous, un employé de l’organisme prenait le taxi pour faire la tournée des urgences de la région torontoise, à la recherche du client. Ils agissaient ainsi parce qu’il arrivait souvent que l’urgentologue modifie la médication du patient, mais la personne chargée du cas n’en était pas informée. Voilà un problème important pour un petit groupe, mais facile à résoudre au moyen des TI.

Nous avons tenté de suivre le cheminement d’une personne au sein du réseau de santé mentale de Toronto (voir la figure 3), qui compte 65 organismes. Comme les flèches le montrent, les gens ne sont pas traités dans un seul organisme et doivent souvent obtenir des soins complémentaires auprès d’un autre organisme. Nous avons réuni les organismes dans l’espoir d’améliorer la cohérence des services et d’amener le système à se centrer davantage sur le patient.

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Courtoisie de M. Matthew Anderson

 

Bon nombre des organismes ou services exploitent leurs propres systèmes informatiques. L’enjeu consiste à partager l’information, de manière qu’elle suive le patient dans le système. Plutôt que de démanteler les anciens systèmes et de les remplacer, il faudrait les relier entre eux pour communiquer l’information. C’est ce que nous tentons de faire dans le cadre du projet de connexion de la grande région de Toronto (GRT). Il s’agirait essentiellement de créer une architecture pour la GRT (voir la figure 4), sans étendre celle-ci à l’échelle provinciale ou nationale, car 95 % de nos soins sont dispensés dans la GRT. Dans les rares cas où un patient torontois est traité à Ottawa, il y a le télécopieur.

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Courtoisie de M. Matthew Anderson

Dans l’élaboration d’une architecture locale, il est très important de ne pas se limiter aux hôpitaux, comme nous l’avons si souvent fait par le passé. En règle générale, les patients ne vont pas d’un hôpital à l’autre, mais de l’hôpital à un centre de soins de première ligne et, de là, à un centre de soins communautaires. Voilà l’interconnexion dont nous avons réellement besoin.

La résistance à laquelle je me suis heurté vient principalement de gens qui croient que le dossier médical électronique n’est que la version électronique du dossier papier. De toute évidence, il faut déployer plus d’efforts pour modifier les perceptions, et Inforoute Santé a raison de vouloir bâtir un capital social.

Réduire le temps d’attente

L’Ontario est maintenant déterminé à réduire le temps d’attente dans les urgences, et le gouvernement s’est publiquement engagé à cet égard. L’administrateur d’hôpital que je suis trouve cette initiative très stimulante. Les défis des urgences ont peu à voir avec le fonctionnement de l’hôpital. C’est sur le continuum des soins qu’il faut se concentrer si l’on veut vraiment réduire l’attente dans les salles d’urgence. Au bas de la figure 4, on voit quelques-uns des systèmes de TI que nous avons mis en place pour l’acheminement des patients dans le système, jusqu’à leur retour à la maison, puis les initiatives non TI visant à réduire la demande, à améliorer la capacité ou à ramener les patients à la maison. Pour la prise en charge du diabète, par exemple, il faut développer des outils de soutien aux soins primaires de manière à réduire une demande évitable. Nous essayons de mettre en place un registre en vue de fournir aux généralistes des rapports cliniques qui amélioreraient le traitement des patients diabétiques. Nous avons connu un certain succès, mais il faudra attendre que les systèmes d’information des divers organismes soient interconnectés pour en faire l’évaluation.

L’année dernière, la fréquentation des urgences a augmenté de 20 % par rapport à l’année précédente dans les hôpitaux du WOHS. Dans la très grande majorité des cas, il s’agissait de patients exigeant des soins peu aigus qui n’avaient pas obtenu les services voulus au niveau des soins primaires et se présentaient à l’urgence pour les obtenir. Nous devons adopter des systèmes qui transforment ce paradigme.

Répondre aux besoins au moyen de ressources appropriées

Il faut améliorer et mieux coordonner les soins communautaires. À Toronto, nous avons établi un système d’aiguillage et d’harmonisation des ressources qui a nettement amélioré le parcours des patients au sein du réseau. C’est l’égalité d’accès qui en a le plus bénéficié, surtout grâce à l’aiguillage. Avec 177 organismes, personne ne peut connaître tous les services disponibles. Le système d’harmonisation des ressources permet au médecin d’entrer l’information recherchée, puis de trouver les ressources disponibles et le temps d’attente s’y rapportant.

Le système a eu d’importantes répercussions sur le temps d’attente, car nous commençons à cerner les temps de latence dans le système, et cela a donné lieu à des changements de comportement. Par exemple, il y avait une grande variabilité dans le temps requis pour transférer un patient d’un établissement de soins de courte durée à un centre de réadaptation. Dans certains cas, le médecin savait dans les huit heures de la demande d’admission si le centre pouvait accepter le patient, mais dans d’autres, il devait attendre jusqu’à sept jours avant d’avoir une réponse, ce qui l’obligeait à envoyer plusieurs demandes. Nous n’avons pas encore donné aux patients accès au système d’aiguillage et d’harmonisation des ressources — les établissements ne pouvant s’imaginer que les patients pourraient réserver leurs propres interventions. Pour le moment, seuls les médecins et les infirmières peuvent utiliser le système.

Le mandat du WOHS, tel qu’il figure dans l’énoncé de mission, est « de concevoir des systèmes de santé qui servent l’ensemble de la communauté ». En collaboration avec le conseil d’administration, nous examinons le concept de continuum des soins, le rôle que nos établissements joueront dans ce continuum et la manière dont nous interagirons avec les établissements et organismes responsables de la prestation des soins que nous ne dispensons pas. Notre objectif est d’offrir aux patients un système de santé unifié, mais nous ne l’atteindrons pas avant d’avoir mis en place les systèmes d’information. Chose certaine, en tant qu’hôpitaux, notre tâche déborde les limites de nos établissements. Nous devons faire équipe avec les organismes communautaires, les équipes de santé familiale et des centres spécialisés pour que les pièces s’emboîtent et forment un système intégré pour nos patients.